fbpx

Nouveau pacte de migration

La Commission européenne a dévoilé le 23 septembre dernier sa proposition pour une réforme de la politique migratoire de l’Union européenne. Ce  pacte sur la migration et l’asile propose une approche européenne globale de la migration et se veut être un pacte “plus solidaire, plus juste et raisonnable”, selon la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen.

En réalité, le pacte est loin d’être un exemple de solidarité et est truffés d’incertitudes.

La Règle de Dublin qui met actuellement la pression sur les pays d’entrée devait être abandonnée

Et pourtant, cette règle qui consiste à ce que les migrants fassent leur demande d’asile dans le premier pays qu’ils atteignent en Europe (pays dits d’entrée) est maintenue comme principe général. Ce qui a conduit et conduira à une surreprésentation des populations en demande de statut sur le territoire de quelques états membres et non une répartition sur l’ensemble du territoire européen.

Certes quelques changements mineurs sont proposés tels que par exemple la possibilité qui serait donnée à une personne migrante d’introduire sa demande dans le pays dans lequel elle aurait des liens familiaux. Par contre le mécanisme actuel qui annule la règle de Dublin après 6 mois est lui prolongé à 3 ans ce qui durcit la règle plutôt que de l’assouplir.

Il est également proposé un mécanisme de crise qui pourrait être activé à la demande de l’État Membre qui fait face à un afflux important de personnes à la recherche d’une protection et qui permettrait la relocalisation vers les autres États Membres mais ce dispositif est trop complexe et surtout non contraignant ne donnant aucune garantie sur son fonctionnement.

On ne peut donc pas vraiment parler de rupture avec le règlement de Dublin.

Des personnes en quête de protection triées sur le volet

En 5 jours, préalablement à leur entrée sur le territoire européen, les personnes seront contrôlées sur un plan sanitaire et sur leur identité (principe des Hot Spot tant décriés). Les personnes une fois enregistrées sont triées et orientées soit vers une procédure express d’expulsion si la probabilité de ne pas être recevable est grande, soit vers la procédure classique d’asile. Le pacte reste très vague sur les actions menées à cette étape qui pourrait conduire à de graves infractions de la convention de Genève et du principe de non refoulement.

Par exemple le pacte mentionne que les personnes dont la nationalité totalise moins de 20% du taux de protection dans l’UE se verraient immédiatement orientées vers la procédure express d’expulsion, ce qui représente une atteinte au droit individuel contraire à la convention de Genève et la charte des droits fondamentaux.

Politique de retour

S’il est légitime de considérer le retour comme un pilier de la politique migratoire il est aussi important de garantir les standards du retour, ce qui n’est pas le cas dans le pacte.

Premièrement par le fait que dans le mécanisme de crise « instrument de solidarité » prévu pour soulager les pays d’entrée, la proposition donne le choix aux États membres soit d’accueillir les personnes ayant un droit d’asile soit d’expulser celles qui ne l’auraient pas obtenu. Les pays les plus réfractaires à l’accueil choisiront de facto l’expulsion et ces mêmes pays seront en charge de négocier des accords bilatéraux de réadmission avec les pays tiers sans garantie que ces accords soient respectueux des droits fondamentaux de la personne migrante.

Frontex serait ensuite le bras opérationnel de cette politique de retour négociée par les pays réfractaire. Hors le contrôle démocratique de l’Agence est quasi inexistant et les médias ont déjà dénoncé les faiblesses de Frontex en matière de respect des droits fondamentaux des personnes migrantes.

Enfin la refonte de la directive retour dans le but de réduire les mouvements autorisés des personnes migrantes et de mettre en place des détentions systématiques des personnes ayant reçu l’ordre de quitter le territoire est elle aussi problématique car cela signifie l’enfermement massif et la reproduction des camps de détention.

Mécanisme “solidaire”

Si un pays est soumis à une trop grande “pression” migratoire, il peut demander l’activation du “mécanisme de solidarité obligatoire”, décidé par la Commission. Une évaluation du nombre de migrants à prendre en charge est alors établie et tous les États sont mis à contribution en fonction de leur situation économique et démographique.

Ce mécanisme vise à contourner le refus persistant de plusieurs pays, notamment la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie d’accueillir des migrants.

Les Etats ont alors le choix entre accueillir les demandeurs ou à aider leur retour dans leur pays d’origine, c’est à dire financer leur renvoi dans le pays qu’ils ont fui. Les pays qui n’obéissent pas à ce mécanisme pourraient être sanctionnés par des amendes. Cependant, ce mécanisme donne l’opportunité aux pays de se montrer ultra protecteur en opérant des expulsions massives.

Qu’en est-il vraiment de ce pacte ?

En réalité, ce nouveau pacte repose sur les mêmes principes de dissuasion et de protection des frontières présents dans la politique migratoire de l’UE depuis des années et qui ont prouvés être un échec.

Un véritable nouveau pacte de migration doit avoir au centre de ses préoccupations le respect des droits fondamentaux des migrants.

Pour qu’une vraie solidarité s’installe entre les pays membres et que la confiance soit rétablie, il faut un mécanisme permanent et obligatoire de relocalisation. Ce mécanisme permettra également de régler les problèmes rencontrés par les pays du sud. Ce mécanisme de solidarité doit être la règle de base et non une règle à appliquer dans les cas d’exceptions comme cela est prévu dans ce pacte. Cette solidarité doit être une solidarité basée sur l’accueil et non sur le retour.

Dans une Europe où les gouvernements populistes sont de plus en plus présents, il est impératif qu’en tant que Parlementaires S&D nous nous battions pour faire respecter les principes fondamentaux de l’Union européenne, et cela passe évidemment par une politique migratoire qui est véritablement juste et solidaire!